mardi 29 janvier 2008

SANTE-TOGO :Les séropositifs s’inquiètent de l'indisponibilité des ARV





Des ruptures de stocks des anti-rétroviraux (ARV) sont constatées depuis plusieurs mois au Togo où quelque 6.000 malades du SIDA ont accès à ces traitements dont 3.000 pris en charge par l’Etat et 3.000 autres par le Fonds mondial de lutte contre le SIDA, selon le ministère de la Santé.

Plus de 13.000 autres malades attendent de bénéficier de ces ARV qui prolongent la vie des personnes vivant avec le VIH/SIDA, selon la même source.

"Nous sommes très inquiets de la situation qui prévaut dans notre pays en ce qui concerne la disponibilité des ARV qui connaissent d'incessantes ruptures de stocks", a déclaré à IPS, Augustin Kokouvi Dokla, président du Réseau des associations des personnes vivant avec le VIH au Togo.

Les malades, qui ne sont pas pris en charge par l'Etat togolais et le Fonds mondial de lutte contre le SIDA, la tuberculose et le paludisme, achètent les ARV -- exonérés de taxes depuis huit ans -- à des prix variant entre environ 10 dollars et 182 dollars par mois en fonction des produits.

"Nous sommes à bout de souffle", affirme Dokla, soulignant que les médecins ont toujours conseillé aux malades de ne pas arrêter le traitement qui est pourtant perturbé par les ruptures répétées de stocks des ARV.

"En principe, nous ne devons pas arrêter le traitement car cela provoque des résistances qui compliquent notre état de santé", a expliqué à IPS, Marie Afi* qui une personne vivant avec le VIH (PVVIH).

De son côté, Kofi Kossi*, une autre PVVIH, ajoute : "Aucune garantie ne nous est donnée sur la disponibilité des médicaments au cours de cette nouvelle année". Il estime que les PVVHI doivent renforcer leurs actions de mobilisation pour exiger la mise à disposition permanente des ARV.

L'année dernière, plusieurs personnes vivant avec le VIH/SIDA ont organisé un sit-in devant le siège du parlement togolais, à Lomé, la capitale, pour réclamer des ARV. Et quelques jours après, un stock de médicaments a été réceptionné et mis à la disposition des malades.

Ce stock était la livraison d'une commande d’ARV en provenance de l'Inde et lancée depuis le 22 juin 2007, selon la directrice de la Centrale d’achat de médicaments essentiels et génériques (CAMEG). Mais la livraison, qui était prévue le 14 août, a été faite plus tard, la firme pharmaceutique indienne ayant enregistré un retard.

Mais pour Dr Mamessilé Assih, directrice de la CAMEG du Togo, la situation est en train d'être gérée. "Les autorités ont pris toutes les dispositions pour que les médicaments soient disponibles", a-t-elle indiqué à IPS. Dr Assih affirme que de nouvelles commandes d’ARV plus consistantes ont été déjà effectuées en Inde pour éviter d’autres ruptures.

Selon elle, les incessantes ruptures des ARV constatées depuis plusieurs mois dans ce pays d'Afrique de l'ouest résultent d'un manque de financement durable.

"Le grand problème que nous avons concerne la mobilisation des ressources pour passer les commandes", a déploré Dr Assih, expliquant que le Fonds mondial de lutte contre le SIDA était le seul partenaire important du Togo pour l'approvisionnement en ARV.

Le stock d'ARV financé par le Fonds mondial est arrivé à rupture en janvier 2007; et à cause du gel de ses subventions d'un montant de 14,1 millions de dollars pour une période de trois ans, le fonds n'a plus renouvelé l'achat des ARV pour le Togo. La dernière subvention avait été accordée en 2004 pour trois ans avant le gel.

Pour motiver sa décision de suspension du financement, le Fonds mondial a évoqué des ''manquements et irrégularités'' constatés dans la gestion des ressources par le bureau du Togo du Programme des Nations Unies pour le développement qui était depuis 2003, le bénéficiaire principal des subventions. Selon le fonds, les irrégularités sont liées à la qualité des données fournies et à un écart de 20 pour cent entre les objectifs fixés et ceux qui sont atteints.

En novembre 2007, pour la deuxième année consécutive, une demande de financement du Togo a été rejetée. Toutefois, malgré l'arrêt des subventions, le Fonds mondial continue par soutenir l'achat des ARV pour les 3.000 malades qu’il a pris en charge.

Mais pour faire face aux difficultés du moment, Dr Assih estime qu'une forte implication des autres partenaires au développement du Togo est nécessaire dans l'approvisionnement du pays en ARV.

"Le gouvernement n'est pas resté les bras croisés face à ce problème", a déclaré, pour sa part, Charles Kondi Agba, le ministre togolais de la Santé. Selon lui, le gouvernement togolais a débloqué l'année dernière un fonds d'urgence d'environ 366.000 dollars pour l'achat des ARV.

Le gouvernement consacre chaque année plus de 341.000 dollars à la lutte contre le VIH/SIDA, selon le ministère de la Santé.

Par ailleurs, selon le ministre, le chef de l'Etat togolais Faure Gnassingbé, président du Conseil national de lutte contre le SIDA, s'est engagé à financer pour plus de 18 millions de dollars les actions de lutte contre le SIDA pour les quatre prochaines années. "C'est dire que les plus hautes autorités du pays ont pris à cœur le problème du VIH/SIDA en mettant des moyens conséquents", a souligné Agba.

Simplice Anato, président d'Arc-en-ciel, une organisation non gouvernementale basée à Lomé, estime toutefois que "Ces ruptures de stocks ont de graves conséquences sur les actions de prévention du SIDA. Cela fait que les gens n'ont plus le courage de faire le test de dépistage du SIDA", a-t-il ajouté.

Un rapport sur les indicateurs de base résumant les activités réalisées dans le cadre de la lutte contre le VIH/SIDA au Togo, validé la semaine dernière à Lomé, révèle que 15,5 pour cent de la population togolaise âgée de 15 à 49 ans ont déclaré avoir subi le test de dépistage en 2007 pour connaître leur statut sérologique.

Selon le rapport, le nombre total des personnes vivant avec le VIH est d'environ 110.000 avec une prévalence qui est passée de 5,8 pour cent en 2001 à 4,7 pour cent en 2004, et à 3,2 pour cent en 2005 et 2006.

Le nombre de cas cumulés de SIDA déclarés de 1987 jusqu'à la fin de 2005 est estimé à 20.676 au Togo pour une population de cinq millions d'habitants, selon le ministère de la Santé.

(* Certains noms dans cet article ont été changés pour protéger l'identité des personnes concernées). (FIN/2008)

Noël Kokou Tadégnon in INTER PRESS SERVICE NEW AGENCY

1 commentaire:

Anonyme a dit…

felecitation